La broderie japonaise : toute une histoire…

La broderie japonaise : toute une histoire…

La broderie japonaise apparaît en occident assez récemment, néanmoins elle fait partie de la culture japonaise depuis plus de mille ans. La broderie à la soie, d’abord développée en Chine, arrive au Japon par la route de la soie il y a 1500 ans.

Les origines chinoises de la broderie japonaise Nihon shishu

La broderie japonaise trouve ses origines dans la broderie chinoise. Celle-ci est introduite au Japon au 6e siècle, il y a 1500 ans environ, par des artisans Coréens. Elle arrive alors sous la forme d’images brodées de Bouddha car c’est aussi à ce moment-là que le bouddhisme s’implante au Japon.
La broderie japonaise traditionnelle, Nihon shishu en japonais, est un art transmis oralement de maîtres à apprentis.

La broderie japonaise orne d’abord des objets religieux puis des vêtements luxueux

Dans ses débuts, la broderie japonaise est utilisée uniquement sur des objets et des vêtements à vocation religieuse. Puis au fil du temps, elle accompagne l’évolution du costume japonais. La broderie sert d’abord à décorer les vêtements des nobles de la court impériale, des lords féodaux et des acteurs du théâtre Noh. Plus tard elle orne les vêtements des riches marchands et celui des geishas. Aujourd’hui encore, elle est présente lors des événements importants de la vie japonaise, notamment pour décorer les obis (sortes de ceintures) et les kimonos de cérémonie.

Nuido : la Voie de la broderie

Avec le temps, la broderie japonaise traditionnelle se transforme profondément et prend le nom de Nuido ou « la Voie de la broderie ». Le mot Do, qui signifie « la Voie » en japonais, révèle la vraie nature de cette forme d’art. D’ailleurs, on retrouve cette quête de spiritualité dans d’autres arts japonais, comme la calligraphie ou la cérémonie du thé. Au cours de ces pratiques, il s’agit de trouver le chemin vers la connaissance de soi-même par soi-même, ce qui représente une forme de liberté.
Les sujets de Nuido sont caractéristiques de la sensibilité et de l’esthétique japonaises : animaux, plantes, eau et montagnes. Ces motifs sont représentés sur le tissu dans l’intention de créer un accord parfait et harmonieux entre le rythme interne de l’artiste et le rythme externe de la nature.

Les périodes historiques de la broderie japonaise

Période Nara (645-794)

La broderie se développe au Japon avec l’importation d’images religieuses, avant et pendant la période Nara. Ainsi, on a découvert des fragments de broderie japonaise qui datent de 622.

Au début, la broderie est utilisée pour décorer les objets et les vêtements utilisés lors des cérémonies religieuses. Au fil du temps, les artistes japonais ont développé des techniques spécifiques, faisant ainsi évoluer la broderie japonaise vers une nouvelle forme d’art.

La pièce de broderie la plus ancienne encore existante est la fameuse Tenjūkoku shūchō (Broderie de la longue vie au paradis, conservée par le temple Chūgū-ji), Cette œuvre est réalisée à la demande de la femme du prince Shōtoku – Tachibana no Ōiratsume – à la mémoire du prince après son décès.

Toutes les connaissances techniques de la broderie sont rassemblées à Kyoto quand cette ville devient la capital du Japon en 794. C’est à ce moment que la tradition de la broderie de Kyoto est instaurée. Cette tradition est toujours en vigueur de nos jours.

Période Heian (794-1185)

Au début de la période Heian, la broderie est utilisée pour décorer les vêtements des dames de la court. Cette broderie est réservée à la noblesse car elle est coûteuse en temps, matière et main d’œuvre.

Au cours de cette période, alors que la culture japonaise est florissante, la broderie est largement utilisée pour décorer des vêtements tels que le jūnihitoe (robe de cérémonie constituée de 12 épaisseurs de tissu portée par les femmes de l’aristocratie).

Costume japonais traditionnel : le junihitoe

Costume japonais traditionnel : le junihitoe (source : Wikipédia)

De la fin de la période Heian à la période Kamakura , les japonais sont préoccupés par l’arrivée du Mappo (l’époque Mappo désigne traditionnellement une période de décadence des enseignements de Bouddha). Les images brodées de Bouddha sont alors réalisées comme un acte de vertu, dans l’espoir d’aller au paradis après la mort.

Période Kamakura (1185-1333)

Durant la période Kamakura, l’intérêt pour la broderie s’accroît du fait de son utilisation par le peuple pour la réalisation d’images religieuses. Et en dehors des motifs tissés, c’est également le moyen le plus populaire de décorer les vêtements.

Période Muromachi (1392-1568)

Au cours de la période Muromachi, des techniques simples de broderie servent à décorer les habits utilisés lors des divertissements populaires, tels que les costumes du théâtre Noh.

Période Azuchi-Momoyama (1568-1600)

À cette époque, la broderie couvre entièrement le vêtement. C’est un style que l’on peut encore voir aujourd’hui sur les costumes Noh. On retrouve d’ailleurs sur ces costumes une autre technique de décoration qui se développe à cette même période, celle du surihaku. C’est une technique qui consiste à appliquer de la colle sur le tissu, à main levée ou à l’aide d’un modèle à motif ajouré, puis d’y coller une feuille d’or ou d’argent, avant d’ôter l’excédent de la feuille avec une brosse pour faire apparaître un motif.

Edo (1600-1868)

Le Japon est alors dans un système féodal. La société est divisée en classes distinctes auxquelles sont associées des styles vestimentaires spécifiques. C’est ainsi qu’en 1683, le Shôgun (chef militaire) interdit aux classes « inférieures » de porter le kimono richement brodé.

Broderie sur kosode – Période Edo (source : http://www.fuyuya.com/activities/daruma/daruma-nihonshishu.pdf)

Pendant les périodes Keicho (1596-1615) et Kan’ei (1624-1644), les préférences évoluent vers de petits motifs, réalisées avec des points courts et clairsemés, par exemple pour créer de minuscules paysages de fleurs et herbes d’automne.

Au cours des périodes Manji (1658-1661) et Kanbun (1661-1673), la broderie devient plus dense et précise, avec une augmentation des détails réalistes, préfigurant la maturité de la période Edo.

Au cours de l’ère Kyôhô (1716-1736), la broderie est de plus en plus utilisée comme unique moyen de décoration. C’est à cette période que la technique Sunui est développée, basée sur du dessin à l’encre. Elle est caractérisée par des lignes fines, une gamme de couleurs réduite et un fond monochrome.

Technique de broderie japonaise kin koma sur un uchikake

Technique kin koma sur un uchikake (source : http://www.fuyuya.com/activities/daruma/daruma-nihonshishu.pdf)

Au 19ème siècle, la broderie est combinée à d’autres techniques de décoration, par exemple sur le katabira et le kosode. Le kosode est l’ancêtre du kimono, il dérive du sous-kimono. Un katabira est un kosode d’été sans doublure, décoré avec des dessins au pochoir soulignés par de la broderie, notamment des fils métalliques couchés – technique appelée Kin koma.

Meiji (1868-1912)

Il faut attendre la période Meiji pour que la broderie japonaise se perfectionne et devienne plus délicate, avec plus de détails réalistes.

Jusqu’alors, la broderie au Japon est appelée Nui, ce qui signifie,littéralement, « couture ». Mais le mot Shishu devient à la mode avec l’arrivée des techniques de broderie occidentale. C’est à partir de ce moment que la broderie japonaise prend le nom de Nihon Shishu.

Broderie japonaise sur fusuka - Période Meiji

Broderie sur fusuka – Période Meiji (source : http://www.fuyuya.com/activities/daruma/daruma-nihonshishu.pdf)

Néanmoins, durant la période Meiji, la pratique de cet art traditionnel recule en raison de la disparition du système féodal et de l’affaiblissement des temples bouddhistes. La nécessité de se tourner vers les marchés étrangers conduit à la création d’ objets brodés nouveaux tels que des panneaux, tapisseries, rideaux et nappes qui viennent décorer les intérieurs des pays occidentaux.

La naissance de la technique de la « peinture brodée » au Japon est liée à la situation des artistes de Kyoto qui, comme les artisans brodeurs, perdent également leurs commanditaires. Ils commencent alors à proposer des créations destinées à la broderie. C’est ainsi que de grands maîtres de la broderie exercent leur habileté sur les œuvres d’artistes majeurs comme Kishi Kikudō (1826-1897), Imao Keinen (1845-1924) et Takeuchi Seiho (1864-1942). De nouveaux motifs apparaissent, inspirés de la faune, de la flore, des paysages.

Pendant l’ère Meiji, les motifs discrets sont préférés. Des touches de broderie sont employées afin d’accentuer ou de souligner des objets au sain de scènes simples.
Entre 1850-1915, le uchikake (sur-kimono de femme), est souvent entièrement brodé, avec des motifs symbolisant de bons présages.
L’ère Taishô (1912-1926) est caractérisée par le retour de motifs plus chargés, souvent associés avec Yûzen, la peinture sur soie. Les machines à broder permettent de réaliser des motifs plus denses et compacts.

Broderie japonaise - Période Taisho

Broderie japonaise – Période Taisho (source : http://www.fuyuya.com/activities/daruma/daruma-nihonshishu.pdf)

Grâce à des personnes comme Tanaka Rishichi qui a initié le commerce de la broderie, Nishimura Sōzai’emon qui a introduit les œuvres de peintres dans le monde de la broderie, et Lida Shinshichi qui a facilité l’exportation de masse de la broderie japonaise, le commerce de la broderie japonaise prospère pendant la période Meiji et Taisho.

La broderie japonaise devient un art qui représente les valeurs du Japon, lui faisant gagner des récompenses à l’Exposition Universelle. Elle est alors considérée comme un objet de valeur pour le commerce et les échanges de présents diplomatiques.

Des exemples de ces broderies japonaises peuvent être contemplées aujourd’hui encore dans les collections de musées renommés tels que le British Museum et le Victoria and Albert Museum à Londres, le Musée des Tissus et des Arts décoratifs de Lyon, et le Osterreichisches Museum à Vienne. 90% de ces pièces, brodées pour le commerce durant les périodes Meiji et Taisho, ont été fabriquées à Kyoto.

En 1976, la broderie de Kyoto est déclarée « art traditionnel national » par le ministre de l’économie, du commerce et de l’industrie.

Broderie japonaise par Le Fil à L'Œuvre

Broderie japonaise par Le Fil à L’Œuvre

Sources
Ce texte est le résultat d’une traduction libre inspirée des sites suivants :
Kyoto embroidery
Japanese embroidery (Nihon shishu)

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2 commentaires sur “La broderie japonaise : toute une histoire…”

  1. Cécile dit :

    Bonjour
    Merci pour votre avis, nous essayons effectivement de rendre notre site le plus agréable et visuel possible.
    Bonne continuation.

  2. Dalenço, dit :

    bonjour,
    j’ai visitée votre site , et, je l’ai trouvée magnifique , j’adore le broderie très bien
    bonne journée chantal dalençon